Crise agricole : les trois mesures que réclament les agriculteurs

Publié le 18/02/2016

Les agriculteurs insistent sur trois points précis pour résoudre la crise. Mais l'État et l'Europe se renvoient la balle. Qui peut agir ?

La crise agricole traîne et les solutions ne viennent pas. Eurocrates bruxellois et technocrates de l'État français se renvoient la balle. « On ne peut agir qu'au niveau européen », se défendent certains responsables politiques. Mais, lundi, la réunion à Bruxelles des ministres européens de l'Agriculture n'a rien donné. Pourtant, les agriculteurs français ne cessent de réclamer trois avancées bien précises depuis plusieurs semaines. Qui peut appliquer ces mesures ?

1. Intervenir sur les prix

- Le constat : La plupart des filières agricoles ont vu leur prix stagner depuis trente ans, voire s'effondrer pour le secteur du lait. De 0,38 centime d'euro le litre il y a deux ans, un producteur laitier le vend désormais 0,30 centime. Même problème pour le porc, dont le prix avoisine 1,11 euro le kilo, contre 1,40 euro l'été dernier. En chute libre, le prix d'un produit agricole ne permet plus de combler son coût de production.

- Qui peut agir ? Si l'État ne peut intervenir sur les prix, il entend bien aider les acteurs de la filière (producteurs, transformateurs et distributeurs) à s'entendre sur des prix raisonnables. C'est précisément ce que les deux syndicats du monde agricole, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs (JA), réclament depuis quelques mois : la contractualisation des prix des produits entre les trois acteurs.

2. L'étiquetage et le patriotisme alimentaire

- Le constat : Trois ans après le scandale des lasagnes à la viande de cheval, peu de choses ont changé dans l'étiquetage des produits transformés. Aucune mesure réglementaire n'a été prise par la Commission européenne sur un sujet devenu très important aux yeux des producteurs, mais aussi des consommateurs. Selon une enquête de l'UFC-Que Choisir, l'origine est toujours masquée dans 54 % des produits. « On nous a beaucoup parlé du made in France dans l'industrie. Il faut que les consommateurs sachent que leurs agriculteurs le font. Nous voulons miser sur le patriotisme alimentaire. Ce n'est pas un gros mot », explique Jérémy Decerle, vice-président des JA.

- Qui peut agir ? Pour une harmonisation européenne de l'étiquetage, c'est la Commission européenne qui doit décider. Si la France a mis en place en 2014 une disposition légale pour imposer la mention du pays d'origine - confirmée par le Parlement européen en 2015 -, Bruxelles n'en veut pas et préfère un étiquetage « volontaire ». Motif invoqué : le coût supposé pour les industriels et la distribution.

3. La fin de l'embargo russe

- Le constat : Depuis des mois, le sujet de l'embargo russe est sur la table des dirigeants européens. En 2014, Vladimir Poutine décrétait un embargo sur les produits alimentaires européens en représailles à des sanctions économiques infligées à la Russie en pleine crise ukrainienne. Problème, la Russie fait partie des plus gros importateurs de viande, de lait, de fruits et légumes en provenance de l'Union européenne. Il y a encore cinq ans, la France était le huitième fournisseur du pays en agroalimentaire. La filière du porc fait partie des plus touchées. Avant l'embargo, Moscou importait chaque année 75 000 tonnes de cochon français.

- Qui peut agir ? Difficile à dire. Si les agriculteurs français réclament une fin de l'embargo afin de réexporter leurs produits vers Moscou, le sujet semble dépasser leurs seuls intérêts. Ce sera peut-être l'une des premières grandes missions de Jean-Marc Ayrault au Quai d'Orsay : négocier avec les Russes avec l'aide de ses homologues européens, mais aussi américains, canadiens et australiens, eux aussi concernés par l'embargo.

Source : LePoint.fr