Food : ce qui nous attend

Publié le 02/05/2017

Le Dr Morgaine Gaye est une « futurologue des aliments ». Et ses prévisions sont démentes : texture, noir et imperfections seront au rendez-vous prochainement dans nos assiettes…

A l’occasion de la deuxième journée des D&AD, nous avons pu découvrir certaines des tendances les plus folles en matière de nourriture. Pour les établir, Morgaine Gaye s’intéresse à ce qui se passe dans nos assiettes, mais pas que. « La futurologie des aliments est à la fois une science et un art. Pour établir les tendances alimentaires, il faut s’intéresser à toutes sortes d’indicateurs : géopolitique, écologie, mode, mobilier, comportement… C’est la somme de toutes ces analyses qui dictent la façon dont nous consommons, ce que nous désirons, les packagings que nous aimons ».

Parce que la nourriture n’est pas qu’une question de goût. « C’est plutôt un indicateur social ». Pour preuve, l’importance que prennent les repas dans toutes les célébrations, qu’il s’agisse d’anniversaires (coucou le gâteau), ou de fêtes religieuses. « C’est un véritable marqueur, qui définit bien souvent nos groupes d’appartenance » : si vous êtes végane, vous avez peu de chance de vous retrouver au McDo avec vos copains… « Vous êtes plus probablement entourés de gens qui mangent comme vous ».

Si les régimes sont aussi multiples que variés, Morgaine Gaye réussit à dresser des tendances qui sont en voie de bouleverser nos habitudes, et pas uniquement la façon dont nous mangeons. Spoiler : le food porn ne sera peut-être bientôt plus ce qu’il était… Avis aux foodistas.

Le retour de la texture

A l’heure où tout est plat (les écrans, mais aussi les aliments), Morgaine Gaye prévoit un retour en force de la texture. Selon elle, il s’agit de contrebalancer le « monde virtuel » qui nous entoure de plus en plus.

Cela s’inscrit dans une quête de sens, de volume, de signification.

Pour elle, c’est un renouveau : « Nous n’avons rien vu d’excitant depuis les Pop Rocks ». Mais si, ces bonbons déstructurés… vous vous souvenez ?



Concrètement, aujourd’hui, on fait l’inverse. On restructurise, en quelque sorte. On prend ce qu’on connaît par cœur, et on le transforme.

Ainsi, plutôt que le traditionnel carré de chocolat tout raplapla, on crée des cubes. « C’est la même recette, mais on ajoute un ingrédient : l’air ! On change la forme, et l’expérience ».



On prend les classiques et on les twiste. Bye-bye boring : on crée de l’original jusque dans les supports.



Vous êtes plutôt salés ? Côté makis, on dit au-revoir aux algues toute plates pour les sculpter façon orfèvre.



Tiens… ça ne vous rappelle rien ?



Les couverts s’y mettent aussi : on oublie tous les codes pour proposer une expérience améliorée. Qui a dit que les cuillères devaient être rondes ? et creuses ?



Adieu blanc clinique : le noir, c’est sain aussi

Symbole de pureté ultime, le blanc avait quitté les hôpitaux pour squatter nos intérieurs et nos assiettes. Alors, sommes-nous condamnés à manger du chou-fleur et du fromage blanc 0% jusqu’à la fin de notre vie ?

Apparemment non : le noir revient. « Et pas uniquement parce-que c’est cool », mais parce aussi parce que c’est sain, c’est brut. C’est la terre, la nature, le vrai ! « Les gens cherchent des nouveaux moyens de se déconnecter, parce qu’il y a une notion de survie qui nous plaît. Cette survie, nous la cherchons au quotidien, et aussi dans ce que nous mangeons et buvons : porter sur soi une bouteille d’eau en plastique comme si nous allions mourir de soif, ou avoir des en-cas dans son sac comme si nous allions tomber en hypoglycémie, c’est pour nous aider à survivre à notre quotidien ».

Sauf que demain, votre bouteille d’eau sera peut-être noire.



Et si vous n’avez pas encore goûté au jus de charbon, il paraît que ses vertus sont miraculeuses…



Cette recherche d’une alimentation plus brute que sanitaire pourrait aller dans certains extrêmes : ça vous dit, de la soupe de terre ?



Là encore, la tendance se confirme niveau vêtements, et les designers ne manquent pas d’idées pour proposer une mode plus proche de la nature. On vous laisse découvrir la robe faite à partir de champignons…



Ces adultes qui ne veulent pas grandir

Morgaine Gaye les appelle les « kiddults » : il s’agit de cette génération d’enfants… de 28 ans. Pas pressés à l’idée d’avoir des responsabilités de grands, ils aiment Disney, les motifs rigolos et les smileys, tout en étant préoccupés par le sort de la planète et de leur corps. Ça donne lieu à un curieux mélange des genres : on se retrouve à lire l’étiquette d’un plat pour en connaître la composition et la provenance, et à s’accorder une pause Haribo pour le goûter.



Disruption : le moche, c’est beau

C’est la surenchère du n’importe quoi, de la laideur, de l’absurde. « Quand on regarde les tendances du passé, on les trouve moches. Mais celle-ci l’est déjà ».

Côté food, on se retrouve avec des freakshakes, ces monstruosités dégoûlinantes et impossibles à avaler…



Côté mode, on associe les imprimés aux paillettes, les rayures aux pois, et le rose au vert.



« C’est poussé à l’extrême : le moche devient une nouvelle norme, cool. On croise de plus en plus d’adultes avec des appareils dentaires ! »
Et ce moche se retrouve dans nos assiettes. « C’est brut, cru, sanguinolent, et parfois pas très appétissant ».

Adeptes du foodporn : rangez vos filtres Instagram. Nous aspirons à un futur où les plats de pâtes mal préparés laisseront la place aux préparations ultra soignées. « Nous revendiquons les imperfections, car nous revendiquons ce que nous sommes, et personne n’est parfait ». #uglyfood !



« C’est assez fascinant comme tendance. Un peu comme un clip de Die Antwoord : ça dérange, mais on ne peut pas s’en détacher… »

Bon appétit…

Source : http://www.ladn.eu/nouveaux-usages/usages-et-style-de-vie/food-ce-qui-nous-attend/