Ce qu'il faut retenir de l'allocution de Macron face aux agriculteurs

Publié le 26/02/2018

À deux jours de l'ouverture du Salon de l'agriculture, qu'il inaugurera, le chef de l'État recevait ce jeudi à l'Élysée près de 700 jeunes agriculteurs.

Alors que les derniers préparatifs battent leur plein pour l'ouverture du plus important rendez-vous de l'année pour le monde agricole, Emmanuel Macron a tenu à recevoir à l'Élysée une délégation forte de plusieurs centaines de jeunes agriculteurs et à leur exposer sa stratégie concernant la protection et le développement du secteur. Il a notamment évoqué le mise en place d'un plan de financement de l'agriculture d'un montant de 5 milliards d'euros.

Des prêts pour accompagner les jeunes

« Nous allons mettre en place dans le cadre de ce plan un nouvel instrument d'un milliard d'euros de prêts garantis. C'est un travail conduit et finalisé avec la Banque européenne d'investissement », a précisé Emmanuel Macron. « Nous allons élargir le mode de financement pour prendre en compte les évolutions en cours et permettre aux jeunes agriculteurs de démarrer dans le métier dans les meilleures conditions », a-t-il assuré. Le président a également annoncé la création d'un « fonds de prêts à la méthanisation à hauteur de 100 millions d'euros », avec Bpifrance, et la semaine prochaine, lors du Salon de l'agriculture, « un plan de profonde réforme des règles de développement des méthanisé, car, aujourd'hui, c'est beaucoup trop compliqué, ça vous prend beaucoup trop de temps ».

Or, « pour nombre d'entre vous, en particulier ceux qui sont dans une filière en difficulté, le développement d'une activité de méthanisation, c'est la possibilité d'avoir un revenu complémentaire », a-t-il déclaré aux agriculteurs. Le président de la République a promis un plan d'investissement de cinq milliards d'euros pour l'agriculture qui doit être consacré à la baisse des produits phytosanitaires, la biosécurité des animaux et des plantes, l'indépendance protéique de la France, la santé et le bien-être au travail, ainsi qu'aux économies d'énergie.
Des « verrous » pour protéger les terres françaises

« Pour moi, les terres agricoles en France, c'est un investissement stratégique dont dépend notre souveraineté, donc on ne peut pas laisser des centaines d'hectares rachetés par des puissances étrangères sans qu'on sache la finalité de ces rachats », a déclaré le président de la République. « Nous mettrons donc très clairement sur ce sujet des verrous réglementaires et nous travaillerons avec vous et avec les Safer [sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural, NDLR] pour mettre fin à ce qui est en train de se passer », a ajouté Emmanuel Macron face à des centaines d'agriculteurs.

Un investisseur chinois, le groupe HongYang, a notamment acquis récemment 1 700 hectares de terres à blé dans l'Indre et 900 hectares dans l'Allier, suscitant beaucoup d'émotion en France. Sur le problème plus global de l'accès au foncier pour les jeunes générations d'agriculteurs, le président a demandé « pour le mois de mai » qu'on « imagine » un système de « préretraites agricoles avec une sortie progressive de l'activité » afin de permettre à un jeune de prendre la suite de ses parents. « Si on veut alléger le coût pour le jeune, il faut qu'on ait un dispositif crédible pour celui qui arrête son activité », a-t-il expliqué. 40 % des agriculteurs d'aujourd'hui seront partis à la retraite en 2021, a-t-il précisé.

Il s'est déclaré « à l'écoute » des propositions du Syndicat des jeunes agriculteurs sur l'éventuelle mise en place de « prêts d'honneur » afin d'aider aux installations de jeunes, « compte tenu du défi du renouvellement des générations à venir » dans le secteur. En matière de foncier, Emmanuel Macron a aussi annoncé un recentrage du contrôle des structures agricoles sur les seules « opérations qui le justifient », et une redéfinition du « rôle et de la gouvernance des Safer ». Plus globalement, après 53 minutes de discours, pendant lequel il a aussi donné les grandes lignes des secteurs dans lesquels seraient investis les 5 milliards d'euros prévus pour l'agriculture, le président a conclu son intervention au ton offensif sur un : « Je ne suis pas là pour plaire, je suis là pour faire », en fustigeant les générations de dirigeants qui l'ont précédé et se sont contentés de « tapoter les vaches ».

Un important déficit commercial

Emmanuel Macron a affirmé que la France avait un milliard d'euros de déficit commercial en matière de bio, qu'il souhaite « compenser ». « Nous avons aujourd'hui un déficit commercial d'un milliard d'euros en bio, ce qui est quand même fou, nous pouvons le compenser, nous devons le faire », a-t-il déclaré devant. « Le plan “ambition bio” doit nous permettre d'atteindre l'objectif de 15 % des surfaces (agricoles) en bio d'ici 2022, avec une priorité donnée à la conversion dès 2018 pour accompagner la tendance et un renforcement du “fonds avenir” bio », a-t-il déclaré.

Il a indiqué que le plan d'investissements de cinq milliards d'euros concernant l'agriculture et le secteur alimentaire « accompagnera aussi des objectifs en matière de bio ». Promettant des « annonces concrètes et précises » pour le salon de l'agriculture qui doit s'ouvrir samedi à Paris, il a indiqué que ces annonces nécessitent « que nous ayons de notre côté clarifié les retards de paiement » des aides européennes aux agriculteurs.

Le bœuf aux hormones

Le président de la République a assuré « qu'il n'y aura[it] jamais de bœuf aux hormones en France », même si des accords internationaux comme celui avec le Mercosur étaient signés. « Il n'y en aura jamais, il ne faut pas jouer avec les peurs des gens », a-t-il indiqué, estimant que « s'il y en a aujourd'hui, c'est parce que les contrôles sont mauvais, c'est parce qu'il y en a qui fraudent ». « Il n'y aura aucune réduction de nos standards de qualité, sociaux, environnementaux, ou sanitaires à travers cette négociation », a ajouté le chef de l'État, en assurant qu'il travaillerait à ce qu'il soit possible de « bien contrôler aux frontières la traçabilité et les normes environnementales et sociales ».

« En décembre, on aurait pu conclure un accord, mais comme la France avait mis des lignes rouges, la commission ne l'a pas signé », a rappelé Emmanuel Macron. Le président a tenu à rassurer les agriculteurs français, qui redoutant un afflux de viande bovine en provenance d'Amérique du Sud, ont manifesté mercredi à travers le pays. Plusieurs centaines d'agriculteurs de moins de 35 ans ont été invités jeudi à l'Élysée, à deux jours de l'ouverture du Salon de l'agriculture.

Source : LePoint