Télémédecine : en France, les startups se mobilisent face au coronavirus

Publié le 20/03/2020

La télémédecine se développe en France depuis plus de 30 ans.

Avant l’arrivée du coronavirus, il était inimaginable que la pratique de la consultation médicale à distance connaisse une accélération frénétique en France. L’histoire de la télémédecine se développe pas à pas, depuis plus de trente ans en France et dans beaucoup de pays, sous forme de projets et d’expérimentations destinés à des contextes spécifiques et non pas à la pratique quotidienne. Si la France a été pionnière avec la création de l’Institut Européen de la Télémédecine en 1989, il a fallu vingt ans pour qu’un premier cadre réglementaire soit établi, à l’occasion de la loi « Hôpital, Patients, Santé, Territoires » de 2009 (la loi HPST définit cinq actes de télémédecine: la téléconsultation, le téléconseil, la télé-expertise, la télé-surveillance, la télé-assistance).

Puis, il a fallu attendre le 15 septembre 2018 pour qu’intervienne le remboursement de la téléconsultation. Mais ce n’était pas facile pour les patients de remplir les obligations d’une consultation remboursée (le patient devait avoir vu son médecin traitant dans les douze mois précédents, sauf les moins de 16 ans, l’absence ou indisponibilité du médecin traitant, les spécialités peu disponibles (gynécologue, ophtalmologue, stomatologue, chirurgien-dentiste, psychiatre, pédiatre), et un an plus tard, les médecins étaient moins de 2 000 à avoir adopté la téléconsultation, ce qui fait que pour un objectif annoncé de 500 000 actes, seulement 60 000 actes avaient été réalisés.
L’arrivée du coronavirus change la donne réglementaire

Un changement radical du statut de la téléconsultation intervient avec les deux impératifs du coronavirus : le besoin absolu de protéger professionnels et patients de la contagion et la nécessité d’utiliser le temps médical plus efficacement. Le ministre de la Santé, le Dr Olivier Véran, nommé le 17 février 2020, fait en sorte d’élargir le remboursement à tous les patients potentiellement concernés par le coronavirus. Le décret paraît le 9 mars et l’autorisation est valable jusqu’au 30 avril, 2020.
La FrenchTech est au rendez-vous

Grâce aux startups spécialisées de la FrenchTech, et malgré l’annonce par le ministre de la possibilité de le faire, aucun médecin français ne doit avoir besoin de faire appel à des outils non-sécurisés comme WhatsApp, FaceTime, Skype, ou Zoom. Une dizaine de startups françaises propose des possibilités de téléconsultation aux Français.

Et pour encourager les médecins à s’y mettre pendant cette période de crise, les formules d’abonnement des praticiens sont le plus souvent gratuites pendant la durée de l’épidémie. Soulignons que les dirigeants des startups de la téléconsultation sont très conscients de l’importance de leur mission à l’heure actuelle. Toutes ces startups travaillent en flux tendu, installent des cellules dédiées, accélèrent l’inscription de nouveaux médecins. Elles participent à une mission unique, voire historique, d’augmentation du temps médical utile, et de « distanciation sociale » tant pour le patient que pour le médecin, à l’occasion de cette crise sanitaire.

La Société Française de Santé Digitale, (SFSD) la société savante française de la santé digitale, propose un numéro d’appel 06 19 55 85 53 pour les professionnels de santé souhaitant mettre en place la téléconsultation dans le cadre du COVID-19. La SFSD rappelle aussi l’importance de l’usage de dispositifs médicaux connectés afin de compléter la consultation, dont notamment la mesure de la saturation en oxygène, le stéthoscope, le thermomètre, voire le tensiomètre. Et enfin elle incite les professions à la collaboration, en associant infirmiers et pharmaciens à la démarche et en les protégeant.
Les outils de téléconsultation vus par les praticiens

La formule pro classique inclut une assistance pour la prise en main de la plateforme, la gestion de l’agenda des téléconsultations, un système d’appel vidéo sécurisé, un outil pour l’envoi d’une ordonnance, et l’hébergement sécurisé des données.

L’une des startups qui se différencie dans son approche des médecins désirant pratiquer la téléconsultation est Livi, filiale du groupe suédois Kry, arrivée en France en 2018. Chez Livi, la direction médicale est stratégique. Le médecin qui téléconsulte rejoint une équipe de médecins en tant que salarié CDI à temps partiel. Selon Livi « Pour les médecins, c’est un plus en temps de crise, de pouvoir rejoindre une équipe, tout en restant à distance. » D’autre part Livi a établi des liens de collaboration avec les institutions françaises comme les Agences Régionales de Santé. Les médecins de Livi travaillent à partir de protocoles nationaux établis en collaboration avec le SAMU. Et enfin, faisant partie d’un groupe européen, les managers de Livi bénéficient d’outils de communication interne avec les équipes des autres pays.

La société Qare, lancé en 2017, met également en avant « l’ADN médical des fondateurs. » Leur vision était de « construire un outil simple aussi bien pour le médecin que pour le patient » et de faciliter non seulement la télé-consultation ponctuelle mais aussi le suivi du patient. Qare compte des médecins généralistes, de multiples spécialités, des dentistes et des sage femmes. Ses ordonnances sont délivrées dans l’espace patient avec un QR code, permettant au patient de montrer l’ordonnance au pharmacien sur son mobile sans l’avoir imprimée.

Chez Medaviz, basé à Vannes, et fondé en 2017, « l’outil de téléconsultation pour le médecin individuel est gratuit et le restera ; seule l’organisation du temps médical a de la valeur. » Medaviz commercialise une solution SaaS qui s’adresse aux établissements et CPTS ou communautés professionnelles territoriales de santé, et leur permet d’optimiser le temps médical de la téléconsultation, en organisation des permanences ainsi que la collaboration avec les pharmaciens et les infirmiers. Medaviz prépare aussi un volet télé-expertise, qui permettra à un médecin requérant de contacter un médecin expert.

Leah, fondé en 2018, est également une solution SaaS, à destination des médecins libéraux avec des projets hospitaliers à venir. Début mars l’équipe constate une multiplication par trois du nombre de médecins utilisateurs comparée au mois précédent.

DocteurSecu fondé en octobre 2019, complète l’offre classique de téléconsultation par l’aide d’un assistant médical en ligne qui aide le patient avant le rendez-vous et est formé à une approche empathique du patient.

MédecinDirect, fondé en 2010, est l’un des plus anciens intervenants en France de la téléconsultation. Les patients y entrent typiquement suite à proposition de leur assureur ou mutuelle. MédecinDirect a été acheté en 2019, par l’opérateur américain Teladoc, présent dans 130 pays.

Doctolib fondé en 2013 et devenu licorne l’an dernier, est l’intervenant le plus important de la gestion en ligne des consultations médicales. Si la téléconsultation est un service plus récent, Doctolib avait néanmoins réalisé 40 000 télé-consultations au cours de la première année du remboursement. Pour les médecins déjà abonnés à son service de base, Doctolib offre la téléconsultation gratuite pendant mars et avril, et «se met à la disposition de l’Etat pour mettre en oeuvre d’autres actions dans les prochains jours.»

Les outils sont là. Que vous soyez patient ou professionnel, nous espérons que vous trouverez des solutions adéquates. La santé avant tout.

Source : FrenchWeb